De Rêves en Ruses (ou la douceur troublée des utopies)
L’œuvre de Céline Cadaureille se présente à la manière d’un conte, d’une fable intemporelle et contradictoire, organique et inerte, mouvante et statique, délicate et oppressante. Elle nous offre des dispositifs où tout semble se jouer dans les correspondances et les passages, les métamorphoses, les collusions et les collisions.
L’espace plastique est tout d’abord parcouru avec plaisir et jubilation. Le regard happé, la main interpellée. Nous sommes séduits et alléchés par les couleurs dominantes, insistantes, par le graphisme des pièces, par les rondeurs et les épaisseurs moelleuses des oreillers, des polochons, par la suavité des plumes, par les nœuds qui enrubannent une cage, par les quelques parures que nous découvrons ici ou là, plus ou moins cachées dans les plis et les replis des matières. Ce sont aussi les objets familiers, triviaux, qui semblent avoir été récupérés dans la grange, la cave ou le grenier qui, savamment évoqués et métamorphosés retiennent toute notre attention : niche, chaînes, cages à poules, cages ou séchoirs à fromage, perchoirs, échelles, chaise, pinces à linge, traversins et oreillers en plume, literie désuète en dentelle et sarabande de cordages… L’artiste orchestre des jeux de matières, de formes et d’objets en des créations et agencements délicats aux accents souvent précieux. Nous sommes pris dans cette poésie tendre et nostalgique, séduisante et gourmande. Pris et amusés.
Pourtant, Céline Cadaureille nous fait rapidement pénétrer dans une autre dimension. Car toujours, dans son travail comme dans tous les contes – aussi bien dans tous les rêves –, les surfaces sont trompeuses. C’est la ruse de l’artiste. C’est la profondeur troublante de l’œuvre.
[retrouvez la suite de ce texte sur le catalogue d’exposition, La douceur des Utopies, C.C. 2013.]
Emma Viguier, avril 2013
Enseignante-chercheuse en Arts plastiques et Théories de l’art
Université de Toulouse 2 – Le Mirail/laboratoire LLA-Créatis
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